5 minutes sur 127 Hours (2011) :
Réalisé par : Danny Boyle
Ecrit par : Danny Boyle Simon Beaufoy
Produit par : Cloud Eight Films, Film4, Everest Entertainment
Avec : James Franco, Amber Tamblyn et Kate Mara
Durée : 94min
Sortie en France : 23 Février 2011
Je suis toujours très embarassé quand il s'agit de parler d'un film de Danny Boyle, et ce n'est pas la vision de 127 Hours qui a résolu mes problèmes... Mais je suis sûr qu'après la lecture de cette critique-express, il aura l'humilité de savoir prendre simplement son téléphone, pour que l'on parle ensemble des tics qui l'empêchent de réaliser de très bons films...
127 Hours narre la (més)aventure d'Aron Ralston, jeune sportif extrême multi-disciplinaire pourvu d'une assurance à toute épreuve, alors qu'il décide de partir seul effectuer un parcours dans le parc naturel de Canyonland, le bien-nommé.
La journée s'annonçait parfaite. Il se retrouve pourtant, le bras inexorablement coincé sous une pierre, à l'issue d'une chute de plusieurs mètres. Il restera bloqué durant les 127 heures suivantes, en proie au dénuement et à la folie, avec une seule idée en tête : Survivre.
Aucun doute à ce propos : Danny Boyle sait raconter une histoire.
Ce qui pourrait rebuter à priori dans l'exercice du huit-clos, ce sont les redondances et les problèmes de rythme qui procurent aux spéctateurs suffisemment curieux et téméraires, le pire des suplices.
Là, bien heureusement, cette réserve est désamorcée par le rythme épileptique imposé dès le début du film.
Un up-tempo qui sert le double emploi d'imprimer d'emblée un dynamisme rassurant, face à ce qu'annonce le titre, mais également d'illustrer la trop grande vitesse de préparation du héros qui débouchera sur des complications supplémentaires lors de son calvaire. Ce que préfigurent également les plans fugaces sur les objets clés qui lui feront cruellement défaut plus tard.
Ces prémices résument plutôt bien les qualités et les limites du métrage.
Le problème chronique de Boyle, c'est qu'il se borne à raconter l'histoire de la manière la plus fluide et la plus cool possible, en échouant à en extraire quelque-chose de plus fondamental... Ce ne sont pourtant pas les ouvertures qui manquaient pour ce personnage, dans cette situation...
C'est finalement le sablier de l'affiche du film qui symbolise l'élément central du film : le temps... lequel est à n'en pas douter, l'ennemi mortel d'un réalisateur qui camoufle sa minuscule imagination sous un imper d'effets de style aussi datés et superflus, pour traîner crapuleusement autour des écoles...
Probablement trop accaparé par les contraintes inhérentes au genre et par la manière de les résoudre de la façon la moins originale possible, en faisant notamment le pire usage du split-screen ou en évoquant la soif via l'enchainement rapide d'images de pubs pour boissons fraîches, Boyle oublie complètement l'épaisseur du personnage, et sa rage de survivre, le réduisant à un gadget de plus au service du challenge rythmique que représente le récit de ces 127 heures.
Et ils sont nombreux par ailleurs, les gadgets : Musique électro, caméras endoscopiques, bande son à effets, colorimétrie clipesque, phases oniriques... Tout y passe, afin que jamais le spectateur ne se rende compte de la quasi-absence de réflexion du personnage (objet de transfert pour Danny Boyle, il s'évertue simplement à gérer le rationnement, son "temps" de survie), et que notre attention soit captée par la succession de pseudo-évènements inspirés d'émissions à la Man Vs Wild, qui nous mèneront au dénouement traumatique.
On a aucun mal à imaginer la transformation, aussi bien littérale que figurée que cet évènement implique... Et pourtant Boyle passe forcément à coté, puisque pour qu'il y ait transformation, il aurait déjà fallu qu'il y ait forme.
La seule chose qui ait apparemment intéressé le réalisateur, avec ce personnage, c'est le symbole du sentiment américain de toute-puissance qu'il représente.
Seul contre tout et contre tous.
Mais alors, uniquement pour donner un minimum de profondeur au film, hein. Faudrait quand même pas que cela débouche sur le moindre point de vue, non plus...
On s'amusera bien, à se demander si c'est ce qui justifie cette pointe de sadisme du sort, nous permettant d'y voir une forme de justice... Comme si Boyle punissait l'Amérique au nom du reste du monde.
Il y a bien deux trois phrases et effets de mise en scène qui illustrent cette idée, comme les moments où Aron devrait en appeler à ses parents, comme le gosse en péril qu'il est, mais il s'obstine contre ses propres sentiments, dans une rébellion vaine et puérile...
Pas mal... mais alors que viennent faire là ses rêves de rédemption amoureuse ? Simple goût du mièvre ? Cahier des charges Hollywoodien ?
Du coup, la métaphore s'écroule...Surtout à la fin, quand les plans du véritable Aron trahissent la fascination de Boyle pour le personnage.
Dieu merci, il y a James Franco !
Voilà le véritable objet qui accapare l'attention, à défaut du vide qui l'entoure.
C'est le pilier du film, tant l'intérêt passe finalement par son interprétation graduée de la folie, et de la rage de vivre.
Sans Franco, le dénouement du film ne paraîtrait sans doute pas moins qu'anecdotique et par lui passe le seul point de vue qui permette d'extraire une dimension supplémentaire de l'histoire qui nous est contée.
On ne peut donc pas décemment parler de "bon film" en ce qui concerne 127 Hours, tant on reste dans le simple récit d'un évènement, sur musique de jeune... Pourtant cette narration parfaitement maîtrisée met le spectateur lambda à l'abri de l'ennui, ce qui suffira largement au grand nombre... Les plus exigeants, eux, ne se retiendront pas de fustiger ce pur produit d'Hollywood, pour lequel, à mon avis, il faut avoir l'humilité d'avoir un minimum de considération. Que ce soit pour l'interprétation de James Franco, ou pour la limpidité de la narration, observable entre les tics d'un ancien jeune réalisateur qui aimerait rester encore un peu cool.
Le "véritable" Aron Ralston